La Commission pour la Libération de la Croissance Française est de retour


12-11-2010
Par Admin Admin

Il préside aussi la Commission pour la Libération de la Croissance Française. Le premier rapport de janvier 2008 « 316 décisions pour changer la France » est disponible sur le site de la Commission pour la Libération de la Croissance Française (CLCF) http://www.liberationdelacroissance.fr/

Son bilan, presque évanescent, en a été fait dans un livre de Pierre Cahuc et André Zylberberg (le premier est professeur à Polytechnique et le second, directeur de recherches au CNRS), commenté ici :

http://larje.univ-nc.nc/index.php?option=com_content&view=article&id=134:les-reformes-ratees-du-president-sarkozy&catid=27&Itemid=60

Missionnée à nouveau par le président de la République et le Premier ministre en février 2010, c’est l’heure pour la Commission de la restitution du second rapport, paru en octobre 2010. Vous pouvez le télécharger ici :

CLCF_Attali_Rapport_2010_Une_ambition_pour_dix_ans.pdf

Il ne s’est rien passé à la suite du premier rapport…  Se passera t-il quelque chose ? Le 2ème rapport est construit sur l’idée que la résorption des déficits est le socle de la croissance et une exigence de justice. La Commission veut parler au nom des générations futures. Des scénarii sur 3 ans, 10 ans et 20 ans ont été proposés.

Bien sûr, aucun de nous ne sait si les plans de rigueur n’auront pas d’effet pervers et si l’avantage en surpasse les inconvénients. Mais on a entendu depuis 20 ans tant de discours sur l’innocuité de l’accroissement de la dette publique et privée que le système financier a failli s’écrouler. On a simplement substitué en 2008 à la mauvaise dette privée de la dette publique. Et aujourd’hui, il n’y a plus de refinanceur suprême, si le système venait à craquer à nouveau. La sagesse commande de se désendetter.

Il suffit de lire ci-dessous le plan sur 3 ans, pour mesurer l’écart avec les timides mesures de la loi de finances du gouvernement Fillon 1. Le rapport souligne (p. 48) que « si la croissance est inférieure à 2% par an d’ici à 2013, l’ensemble de ces mesures d’économies et de réductions de niches ne suffira pas à ramener le déficit à 3% du PIB ». Comme le Premier ministre a pris les mêmes engagements avec des annonces très en deçà des propositions de la Commission, l’un des deux dissimule la vérité. Sans doute, n’y a t-il pas de réelle volonté politique de réduire les déficits publics ? La seule obsession paraît être d’éviter à la France d’être attaquée sur les marchés avant l’élection présidentielle, comme la Grèce, le Portugal ou l’Irlande. D’ailleurs chaque député, chaque sénateur, dans son coin, n’a de cesse de contrecarrer, pour des raisons diverses et souvent locales, l’objectif fondamental du gouvernement qu’il est censé soutenir. C’est la schizophrénie permanente de la politique.

 

Lisez plus loin ; nous vous laissons juge de ce que serait un vrai plan de rigueur, si on veut que les moyens correspondent aux objectifs affichés. On pourra ensuite aussi lire dans le rapport le plan sur 10 et 20 ans pour le fun.

Le plan proposé pour les trois prochaines années par la Commission pour la Libération de la Croissance Française se décompose selon trois axes :

1) Premier axe de retour à l’équilibre : Des mesures exceptionnelles d’économies, limitées à trois ans, pour plus de 10 milliards d’euros en trois ans

Pour réussir l’ajustement, il est nécessaire d’appliquer, pendant trois ans au plus, certaines mesures exceptionnelles sur les salaires des fonctionnaires et sur une partie des prestations sociales.

– le gel du point d’indice des salaires des fonctionnaires, qui permet de dégager plus de 4 milliards d’euros en trois ans (pour les trois fonctions publiques).

– la poursuite de la politique de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite pour l’Etat et son extension à l’ensemble des administrations publiques (collectivités locales et sécurité sociale). Cela rapporterait près de 3 milliards d’euros d’économies en trois ans ;

– le gel de certaines prestations sociales (aides au logement, allocations familiales, prestations maladie indexées) et la mise sous condition de ressources des allocations familiales. Cela rapporterait près de 4 milliards d’économies en trois ans

2) Deuxième axe de retour à l’équilibre : Maitriser les dépenses de chacun des acteurs publics : Etat, collectivités locales, Sécurité sociale pour économiser près de 40 milliards d’euros en trois ans

Compte tenu de la structure des dépenses, la Commission estime qu’il est indispensable de faire porter durablement l’effort sur l’ensemble des dépenses des administrations publiques (Etat, collectivités locales et administrations sociales). Les dépenses de l’Etat ne représentent que 35% de la dépense publique, l’essentiel étant désormais constitué de la dépense sociale (45%) et locale (20%).

Pour l’Etat, au-delà des mesures exceptionnelles sur la masse salariale, doivent être maitrisées les dépenses de fonctionnement courant et les dépenses d’intervention et de transfert. Ceci doit lui permettre de réduire la tendance à la hausse de ses dépenses de près de 19 milliards d’euros en trois ans.

Pour les collectivités locales :

– La Commission recommande une baisse de 1% des concours financiers de l’Etat ;

– L’ensemble des économies qu’on peut attendre des administrations locales pourrait s’élever à 10 milliards d’euros en trois ans.

Pour les dépenses de sécurité sociale, on pourrait trouver environ 11 milliards d’euros en trois ans, notamment par :

– la maîtrise des dépenses de retraites publiques : le projet actuel de réforme des retraites du Gouvernement prévoit d’économiser 4 milliards d’euros à l’horizon 2013 ;

– la mise sous conditions de ressources de certaines prestations, comme les allocations familiales et la prestation d’accueil du jeune enfant ;

– le déremboursement intégral des médicaments dont le service médical rendu est faible (médicaments à vignette bleues et orange), permettant une économie annuelle d’un milliard d’euros ;

– la participation financière plafonnée des malades en affection de longue durée (ALD) sous condition de ressources et de plus grande précision des critères médicaux d’admission de toutes les ALD ;

– la maîtrise de la rémunération de certains actes et de certaines professions paramédicales.

3) Troisième axe de retour à l’équilibre : Augmenter les recettes en élargissant  les bases de prélèvements fiscaux et sociaux par un montant de 25 milliards d’euros en trois ans

Une augmentation générale des taux de prélèvements ou la création à court terme d’impôts nouveaux ferait courir deux risques potentiels à notre économie :

– celui de pertes de compétitivité et d’emploi en cas d’alourdissement du coût du travail ;

– celui plus général d’un impact négatif sur l’attractivité du pays.

Compte tenu de ces éléments, la Commission considère qu’il faut mobiliser des ressources fiscales et sociales supplémentaires par un élargissement des bases, à taux généraux de fiscalité inchangés. Et d’abord par la réduction des niches fiscales et sociales, ce qui se traduira par une hausse du taux de prélèvements obligatoires. Cette réduction des niches a des vertus que n’ont pas les hausses générales de prélèvements :

– les niches reflètent pour une part des comportements de captation de rentes, au même titre que certaines subventions. Très souvent le bénéfice des « niches » ne revient pas au consommateur ou à l’épargnant final, mais est « capté » par les producteurs et les intermédiaires. Eliminer les niches revient donc à améliorer l’efficacité économique et la concurrence, sans perte de pouvoir d’achat du consommateur final.

– les niches bénéficient, pour beaucoup d’entre elles, aux revenus les plus élevés qui y trouvent ainsi un moyen d’échapper à la fiscalité générale. D’après l’INSEE (2010), le taux réel d’imposition du premier centile des revenus (plus de 84 500 euros de revenus annuels par unité de consommation) ne s’élevait, grâce aux niches fiscales, qu’à 20% du revenu, soit bien moins que le taux théorique résultant du barème de l’impôt sur le revenu. Eliminer les niches, c’est donc rétablir la « vérité des taux » et la justice fiscale.

Dans ce contexte, la Commission formule la recommandation d’éliminer en trois ans le quart des 100 milliards de niches fiscales et sociales identifiées Parmi les niches à éliminer ou à réduire en priorité, on citera :

– les niches fiscales sur les revenus de l’épargne et les plus values de l’épargne et du capital bénéficiant d’un régime fiscal dérogatoire ;

– les niches sur le logement ;

– les niches défavorables à l’environnement (notamment les exonérations de TIPP, de taxe intérieure sur la consommation de charbon ou de taxe intérieure de consommation de gaz naturel) ;

– les effets d’aubaine induit par les taux réduits de TVA ;

– les niches qui dépendent du statut plutôt que du revenu (cas des niches dont bénéficient les retraités, sans condition de revenus).

Par ailleurs, un élargissement de l’assiette de la fiscalité sur les successions permettra d’améliorer la justice sociale et la mobilité du capital, sans coût économique si l’on prend soin de ne pas pénaliser les transmissions d’entreprises. Un retour à la fiscalité sur les successions antérieure à 2007 rapporterait 1,5 milliard d’euros.

Un tel redressement impose un effort considérable à la Nation. Il doit être conforme à l’équité sans laquelle il n’est pas de redressement soutenable des finances publiques. Le rééquilibrage des comptes publics doit traduire l’esprit de justice qui doit animer la Nation à l’égard des générations futures.