L’avis du Conseil d’État n° 407713 du 7 décembre 2023 relatif à la continuité des institutions en Nouvelle-Calédonie


Le gouvernement a interrogé le 16 novembre 2023 le Conseil d’État sur la question de savoir comment « moderniser les règles électorales pour répondre aux exigences démocratiques élémentaires, notamment au regard des obligations conventionnelles de la France. Dans cet esprit, les évolutions démographiques et notamment celle du poids relatif de la population des trois provinces appellent-elles des évolutions de la composition du corps électoral ou du cadre électoral en vigueur ? ». Même dissimulée derrière les bienséances, c’est la question du « dégel » du corps électoral aux arrivants français ayant 10 ans de résidence qui est ainsi posée frontalement.

Lavis du Conseil d’État est construit en deux parties contradictoires. La première, la plus orthodoxe, exige une révision de la Constitution pour ouvrir le corps électoral aux arrivants ou immigrants français. La seconde partie, plus hétérodoxe, résulte des pressions de lexécutif pour obtenir la possibilité de modifier le corps électoral par la seule loi organique. La synthèse, plus politique que juridique, est construite par le Conseil d’État en émettant l’avis improbable quil faut tenter la révision constitutionnelle et quen cas de report indéfini de cette révision constitutionnelle, le gouvernement serait fondé à agir par la voie de la seule loi organique.

En Kanaky-Nouvelle-Calédonie sopposent traditionnellement les deux légitimités de la démocratie et du nombre et celle de la décolonisation. Au moment où le projet de loi constitutionnelle visant à « dégeler » le corps électoral en Nouvelle-Calédonie va devant l’Assemblée nationale, il est important de mesurer les contraintes juridiques, réelles ou feintes, de cette question sensible. 

Mathias Chauchat est professeur de droit public à l’Université de la Nouvelle-Calédonie

Commentaire avis CE 7 12 2023 public

Avis du Conseil d’Etat du 7 décembre 2023