Des résidences touristiques et médicales en Calédonie ?


16-12-2009
Par Admin Admin

Reposant sur la monoproduction de nickel depuis des décennies, l’économie calédonienne semble être amenée à entamer une quête de sens. Avec la mise en place d’un Plan de développement concerté du tourisme se dessine la perspective de recherche d’activités complémentaires ou de substitution au nickel, en termes d’apport de richesses pour le territoire. Ce plan repose sur le principe d’une construction d’une offre en termes de complexes hôteliers aux prestations variées supposée générer une demande, processus soutenu par un renforcement d’une politique de communication forte à destination des touristes-operateurs. Cette vision se heurte à la difficulté suivante : comment valoriser la destination de la Nouvelle-Calédonie dans un contexte de tourisme mondialisé où l’on trouve des plages de sable fin, du soleil et des palmiers à Cuba, au Mexique, en Thaïlande, en Indonésie ou encore en République dominicaine ? Dans une optique de développement similaire, le choix du touriste potentiel s’établira en fonction du prix, pour l’obtention de prestations similaires. La Nouvelle-Calédonie se trouvant à de longues heures de vol de l’Asie, de l’Europe ou de l’Amérique et n’étant desservie par aucune compagnie low cost, il est évident que la seule charge du transport aérien, quelle que soit la compagnie, apparaît comme un élément participant à l’augmentation du coût d’un séjour en Nouvelle-Calédonie sans en augmenter la valeur ludique, culturelle ou autre. Par exemple, il est fréquent de trouver en Métropole des séjours all inclusive en hôtel 5 étoiles en République dominicaine pour un prix moindre de moitié à un séjour de durée équivalente avec un hôtel 3 étoiles (chambre et petit déjeuner) à Nouméa.  Ce constat est un facteur grandement explicatif de la stagnation du nombre de touristes depuis 1997, malgré des dépenses croissantes en termes de communication.

Dès lors se pose inévitablement la question suivante : la Nouvelle-Calédonie a-t-elle pour vocation de devenir une destination touristique stable, en dehors de toute action de forte promotion ? Si l’on se réfère à la conception traditionnelle du tourisme telle qu’elle est perçue par la majeure partie des destinations, la réponse est négative. En revanche, si l’on abandonne le concept de tourisme global et que l’on procède à une fragmentation de la clientèle potentielle, il est possible de trouver des zones de marché insuffisamment exploitées et susceptibles de constituer des opportunités pour la Nouvelle-Calédonie. 
Par exemple, une analyse démographique des zones nord-américaine et nord-ouest européenne fait apparaître une population de plus en plus vieillissante et donc susceptible de souffrir de plus en plus du climat rigoureux de l’hiver ou d’être atteinte par des affections médicales nécessitant une assistance plus ou moins prononcée. Répondre aux attentes d’une telle population pourrait se révéler hautement rentable. Par exemple, cela pourrait prendre la forme de la construction d’une résidence touristique où des seniors canadiens francophones seraient susceptibles de résider durant six mois au cours de l’hiver de l’hémisphère nord. Au-delà d’un climat chaud, la Nouvelle-Calédonie serait en mesure d’offrir une assistance médicalisée, des services d’aides… à des personnes résidant durant plusieurs mois et donc consommant et enrichissant de fait l’économie locale. A l’aide des outils de communication haut débit, il serait possible à tout médecin calédonien de contacter son homologue canadien, d’échanger des informations relatives aux patients comme des radios, des scanners, des données physiologiques… Ainsi la Nouvelle-Calédonie perdrait pour partie son caractère isolé. Sachant qu’au Québec, le temps moyen d’attente dans un hôpital est d’environ six heures avant de pouvoir consulter un praticien et que les cabinets privés n’existent pas, une offre calédonienne de service médicalisé en moins de quinze minutes apparaîtrait comme un facteur attractif pour ce type de touristes. Compte tenu de la variété des services susceptibles d’être proposées : médical, paramédical, animation, culture, aide à la personne, restauration, entretien… il semble évident qu’une telle structure favoriserait l’emploi de Calédoniens et donc renforcerait la cohésion sociale du territoire. 
Le tourisme des seniors n’est qu’un exemple parmi d’autres. Ce qu’il est important de percevoir, c’est qu’une vision globale du tourisme en Nouvelle-Calédonie doit être délaissée au profit du développement d’une approche fragmentée des tourismes. 

Olivier Saissi, maître de conférence à l’Université de Nouvelle-Calédonie

Cet article a été publié dans les Nouvelles calédoniennes le 6/12/2009 sous le lien http://www.lnc.nc/articles/article_71582_264963.htm