Guy Agniel et la délégation de souveraineté


20-10-2010

Les Nouvelles calédoniennes du jeudi 21 octobre, à l’occasion de la mise en place du Comité pour l’Avenir de la Nouvelle-Calédonie, chargé de réfléchir très en amont aux solutions post Accord de Nouméa, donnent la parole à Guy Agniel, professeur de droit public à l’université pour éclairer l’avenir. Il y développe la délégation de souveraineté et l’adapte au contexte spécifique de la Nouvelle-Calédonie.

Vous pouvez retrouver cette interview en suivant le lien suivant :

http://www.lnc.nc/pays/politique/230170-lapres-2014-debute-aujourdhui.html

Le concept de « délégation de souveraineté »

Questions à… Guy Agniel, professeur de droit public.

Les Nouvelles calédoniennes : Que voyez-vous à travers votre concept de « délégation de souveraineté » ?

Guy Agniel : Ce n’est pas une notion qui existe en droit français. Cette expression consiste à décrire un statut : une collectivité – qui pourrait, sur le plan international et interne, exercer ses compétences de souveraineté, devenir indépendante – décide, de manière libre, par un vote de sa population – un référendum local -, de confier l’exercice de ces compétences à la Métropole. C’est un principe nouveau, à peu près le mécanisme du mandant et du mandataire : quand le mandant le souhaite, il peut reprendre le mandat confié à son mandataire.

Mais comment déléguer des compétences qu’on ne possède pas ?

Elle pourra être en mesure, théoriquement, de les exercer. Le transfert des cinq compétences régaliennes (la justice, l’ordre public, la défense, la monnaie et les affaires étrangères) est une posssibilité prévue par la  loi organique, mais aussi par la résolution 1514 des Nations unies relative au droit à l’autodétermination. La Nouvelle-Calédonie peut disposer de ces compétences. Mais est-elle capable de les exercer réellement ?

Concrètement, quel dispositif pourrait encadrer ce statut ?

J’ai imaginé la possibilité d’un concours de volontés. C’est-à-dire que la Nouvelle-Calédonie, par une loi de pays votée à la majorité des 3/5es s’il le faut, devrait inscrire trois éléments dans le texte. Elle constate que toutes les conditions sont réunies pour que, si sa population le souhaite, elle exerce ces compétences de souveraineté et devienne indépendante. Mais elle estime qu’elle n’a pas les moyens de les exercer correctement aujourd’hui. Elle décide donc d’en confier l’exercice à la Métropole, sous réserve éventuellement de la publication d’un rapport annuel.
De l’autre côté, la France vote une loi en termes identiques et accepte d’exercer ces compétences au nom de la Calédonie. Voilà une sorte d’accord entre la Calédonie et la France. Vous me direz « On ne peut pas faire d’accord entre la France et « un morceau de la France ? » » Certes, mais nous avons déjà un précédent, avec la convention fiscale, répertoriée au Jurisclasseur du droit international.

Le niveau d’intervention du territoire sur ces compétences ne devrait-il pas également être précisé ?

Le territoire pourrait demander à être associé à l’exercice de certaines de ces compétences. Et pourquoi pas une double nationalité ? Tout est négociable. Mais tout cela ne peut se concevoir, bien sûr, que si la Constitution est modifiée pour le permettre.. 

Le + du Laboratoire :

Si vous voulez en savoir plus sur cette piste de réflexion, vous pouvez suivre le lien suivant où le concept de délégation de souveraineté est exposé :

http://larje.univ-nc.nc/index.php?option=com_content&view=article&id=159:la-delegation-de-souverainete&catid=15:droit-de-la-nouvelle-caledonie&Itemid=46