Thèmes de recherche


06-02-2008

(English version)

Suivant les termes du contrat d’établissement 2012-2016, la recherche développée par le LARJE trouve, dans la diversité socio-culturelle de la Nouvelle-Calédonie, un champ particulièrement riche et original. Le processus d’émancipation progressive du Pays place la recherche juridique dans un contexte institutionnel inédit et soulève, pour l’analyse économique, des questions spécifiques en termes d’exploitation des ressources, d’activité industrielle, de mesure des inégalités et du rééquilibrage.

Le LARJE (équipe d’accueil n° 3329) a été évalué positivement par l’AERES (Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) en 2011, puis renouvelé et labellisé pour 4 ans par le Ministère (DGESIP, direction générale pour l’enseignement supérieur et l’insertion professionnelle du Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche) pour la période du contrat 2012-2016.

La recherche développée par le LARJE, dont l’acronyme signifie LAboratoire de Recherches Juridique et Economique, est axée sur les ressources naturelles, la biodiversité et l’environnement d’une part, le droit et l’environnement économique et social insulaire d’autre part. Ces thèmes se déclinent dans une optique de développement durable, liée à l’émancipation progressive du Pays dans le statut issu de l’Accord de Nouméa. Ils entendent favoriser une recherche non seulement fondamentale, mais aussi appliquée, sur les aspects économiques et juridiques de l’évolution des populations et des politiques locales liées aux activités humaines et industrielles en Nouvelle-Calédonie, particulièrement le nickel. Dans cette optique, les membres de l’équipe continueront à favoriser les ouvertures sur l’étranger par des collaborations avec les institutions régionales (Communauté du Pacifique – CPS, Programme régional océanien de l’environnement – PROE, notamment) et les universités de la zone (University of South Pacific – USP) à Port-Vila et Suva, Agence universitaire de la Francophonie – AUF et Universités australiennes et néo-zélandaises).

Le LARJE entend adapter et développer dans la durée ces deux thématiques majeures, appuyées sur un outil Internet (http://larje.univ-nc.nc) et complété de la publication régulière des travaux de recherches dans les Cahiers du LARJE en version électronique.

1) Ressources naturelles, biodiversité et environnement

1.1. Il s’agit d’un thème auquel les différents acteurs de la société civile et politique ont été sensibilisés et qui dépasse le cadre géographique de la Nouvelle-Calédonie. En raison de l’existence des grandes réalisations industrielles (usines métallurgiques du Sud et du Nord), les problématiques de la mine, du nickel, de la protection de la biodiversité terrestre et maritime comme du droit de l’urbanisme et de la construction seront fortement privilégiées.

1.2. S’inscrivant dans le cadre du Centre National de Recherche Technologique – CNRT sur le nickel et son environnement, la Nouvelle-Calédonie et le développement minier, comme le droit spécifique au risque industriel (installations classées) feront l’objet d’une attention particulière.

2) Droit et environnement humain, économique et social insulaire

2.1. La problématique « environnement humain » constitue un thème transversal d’une importance considérable en Nouvelle-Calédonie au vu de l’histoire de son peuplement et de l’instabilité de ses statuts successifs (enchevêtrement des normes et compétences juridiques notamment).

2.1.1. Parmi les matières dont l’étude apparaît prometteuse, on trouve le droit de la famille tout d’abord et particulièrement l’état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux et les successions, puisque ces matières concernent au plus près le tréfonds juridique et culturel de sociétés où le transfert des compétences ne peut s’analyser comme une simple transposition des règles métropolitaines ; le droit des biens ensuite avec la délicate question de la compatibilité entre le droit de propriété tel qu’il est conçu en droit français et le rapport juridique au sol des populations kanak. S’ajoute l’étude du règlement des conflits, en particulier la conciliation et le préalable des recours aux conseils coutumiers avant la contestation judiciaire des actes coutumiers, comme le rôle des assesseurs coutumiers. Le droit comparé doit être privilégié dans ces différents domaines du droit privé (civil et coutumier). À ce titre, une collaboration étroite avec l’école de droit de Port Vila de l’Université du Pacifique Sud (University of South Pacific, Suva – Fidji et de Port-Vila – Vanuatu) a été initiée.

Ensuite, le droit du travail, dont la compétence relève de la Nouvelle-Calédonie depuis le 1er janvier 2000, est certainement un domaine dont la clé de voûte est l’environnement social et humain. Les normes de droit du travail transportent en effet une organisation des relations professionnelles, mais aussi une idée des droits et obligations liées à ces dernières. L’histoire du droit du travail montre comment certains comportements sociaux constituent une source propre d’inspiration : la grève, la négociation collective, la sanction disciplinaire, le repos hebdomadaire, sont des notions juridiques issues de pratiques diverses et parfois anciennes. Il est donc intéressant de rechercher si ce phénomène existe aussi en Nouvelle-Calédonie. Plus précisément il s’agit d’analyser de quelle manière les comportements sociaux locaux influent sur les normes de droit du travail.

Le transfert du droit civil et du droit commercial à la Nouvelle-Calédonie durant le mandat du congrès 2009-2014 fera l’objet d’une étude particulière. Le principe de ce transfert démontre la situation originale de la Nouvelle-Calédonie dans un processus progressif d’émancipation, et pose des problématiques nouvelles d’une ampleur considérable. Le transfert des compétences en matière de droit commercial pose, parmi d’autres, la question du choix d’une comptabilité pour la Calédonie à l’heure des IFRS (International Financial Reporting Standard), ainsi que celle de l’actualisation et de l’adaptation permanentes de ce droit.

2.1.2. L’accès au droit ainsi que sa connaissance demeurent des éléments clés d’une citoyenneté encore à construire. L’inventaire du droit de l’outre-mer, c’est-à-dire la recherche du fondement juridique des actions publiques et privées en Nouvelle-Calédonie, recouvre à la fois l’identification du droit applicable suivant le « principe dit de spécialité », et les modèles de transferts des normes juridiques suivant le « principe dit d’assimilation » ou d’appropriation de la norme extérieure. C’est une mission constante du Laboratoire.

Le Laboratoire continuera à approfondir l’étude du droit constitutionnel calédonien. La Nouvelle-Calédonie relève du titre XIII de la Constitution qui déroge sur de nombreux points à la Constitution. Le Laboratoire a conquis dans ce domaine une capacité d’expertise reconnue. La recherche portera également sur la question, dont la terminologie est ambiguë, de la « sortie » de l’Accord de Nouméa. En particulier, l’étude portera sur l’histoire du Pacifique anglophone et la recherche, par le droit comparé, des modèles d’association et d’Etats associés existants.

L’étude comparative du développement d’un droit administratif spécialisé dans les Etats de l’Australie sera également poursuivie. Une coopération particulière sera entretenue avec l’University of QueenslandFaculty of Business, Economics and Law (Brisbane, Australie).

2.2. La problématique « environnement économique » se fait le nécessaire relais de l’environnement humain. Le thème « environnement économique » se découpera en quelques champs d’analyse complémentaires. Il s’agira donc plus particulièrement d’étudier les moyens de sortir d’un système d’économie de dépendance de la Nouvelle-Calédonie vis-à-vis de la Métropole dans la perspective de l’émancipation affichée par l’Accord de Nouméa, d’une part et les économies insulaires et leurs interactions avec les économies nationales et les économies voisines d’autre part.

2.2.1. Le nouvel axe d’études met ainsi l’accent sur « le rééquilibrage ». Il est temps de faire un bilan des Accords de Matignon (1988) et de Nouméa (1998). L’optique de l’équipe est ici de mesurer ce « rééquilibrage » qui est le critère essentiel d’évaluation de l’action publique dans l’accord de Nouméa. L’étude du rééquilibrage permet une réflexion croisée juridique, financière, fiscale et économique. La voie du développement durable nécessite d’assurer l’intégration de l’ensemble des communautés au système d’échanges économiques, afin d’assurer une répartition des bénéfices de la croissance et de la rente minière. Un intérêt particulier sera porté ici à « la formation et à la protection de l’emploi local en Nouvelle-Calédonie », abordées sous l’aspect des qualifications et de l’analyse de la productivité. L’objet de ce programme de recherche est donc d’évaluer l’importance de la formation et son adéquation aux besoins du marché du travail. Le VIIIème Comité des Signataires de l’Accord de Nouméa, réuni à Paris le 25 juin 2010 a convenu de faire réaliser par des experts indépendants un bilan global de l’Accord de Nouméa. A cette fin, un comité de pilotage sera constitué sur le modèle de celui institué en 2008 pour préparer les transferts de compétence. Le laboratoire candidatera à cette expertise.

2.2.2. L’autre champ d’analyse proposé concerne les relations économiques de la Nouvelle-Calédonie avec la Métropole. La question des transferts financiers, au travers de l’étude des finances publiques et de la fiscalité, est un des éléments essentiels de la relation qui s’établit entre les économies insulaires de l’outre-mer et la Métropole. L’émancipation prévue par l’accord de Nouméa pose la question des ressources propres que la Nouvelle-Calédonie devra générer. L’étude des réformes fiscale et monétaire découle de ces questionnements. Le Laboratoire qui s’intéresse déjà à la question de la monnaie et de sa parité, étudiera, de manière complémentaire, la situation des banques en Calédonie, après les accords de Bâle II, ainsi que le financement de l’économie. Grâce aux compétences recensées en gestion, le laboratoire ouvrira le champ de l’évaluation d’entreprises en Calédonie.

2.2.3. La révision de la politique commerciale pose directement la question de l’insertion de la Nouvelle-Calédonie dans sa zone : faut-il se préparer à rejoindre le mouvement d’intégration économique régionale. Les accords d’intégration régionale (PICTA – Pacific Island Country Trade Agreement, PACER – Pacific Agreement on Closer Economic Relations) sont-ils dangereux pour la Nouvelle-Calédonie (concurrence des pays à bas salaires de la zone sur les produits à faible valeur ajoutée et de la Nouvelle-Zélande et l’Australie sur les produits à forte valeur ajoutée) ? Faut-il en ce cas préférer le développement du bilatéralisme (permis par l’OMC) ? Ces problématiques économiques seront utilement complétées par les analyses juridiques d’autres transferts de compétences, notamment le droit commercial dont le transfert est potentiellement autorisé depuis 2004, auront des conséquences économiques appréciables. La Laboratoire a été retenu en 2010 par le Fonds Pacifique dans le cadre de l’appel à projets sur l’intégration régionale dans le Pacifique. L’intérêt du projet qui articule des spécialités d’économie et de droit international public, va permettre des synergies fortes dans l’équipe, et en entretenant des relations suivies avec le Vanuatu.